La procédure de comparution immédiate : tout comprendre en 10 minutes

La comparution immédiate est une procédure pénale rapide permettant de juger une personne en flagrant délit ou après une enquête rapide devant le tribunal correctionnel. Elle s’applique aux infractions passibles d’au moins 2 ans d’emprisonnement (6 mois pour un flagrant délit) et vise à accélérer la réponse judiciaire.
Sommaire
- Qu’est-ce que la comparution immédiate ?
- Les conditions pour une comparution immédiate
- Les étapes avant l’audience de comparution immédiate
- Le déroulement de l’audience de comparution immédiate
- Les alternatives au jugement immédiat : renvoi de l’affaire à une audience ultérieure
- Les peines encourues en comparution immédiate
- Conclusion : pourquoi le rôle de l’avocat est-il si important en comparution immédiate ?
Qu’est-ce que la comparution immédiate ?
La comparution immédiate est une procédure rapide visant à juger les affaires pénales simples et flagrantes. Régie par les articles 393 à 397-7 du code de procédure pénale (CPP), elle permet de traduire un prévenu directement devant un tribunal correctionnel, souvent dès la fin de sa garde à vue.
Ce mécanisme assure une réponse judiciaire rapide.
Les conditions pour une comparution immédiate
Il ne pourra être recouru à la procédure de comparution immédiate que si certaines conditions sont satisfaites.
- Nature des infractions : D’abord, la procédure s’applique aux délits punis d’au moins deux ans d’emprisonnement (ou six mois en cas de récidive légale). Les affaires ayant trait à des crimes ou des contraventions sont exclues du champ d’application de la comparution immédiate.
- Exclusions spécifiques : Ensuite, il existe certaines infractions qui ne pourront pas faire l’objet de cette procédure. Il s’agit notamment des délits politiques, de presse ou impliquant des mineurs sont inéligibles à cette procédure (article 397-6 CPP).
- Caractère simple de l’affaire : Enfin, pour être jugé en comparution immédiate, le dossier doit être suffisamment clair pour éviter des compléments d’enquête approfondis. En d’autres termes, l’enquête pénale ayant conduit au renvoi de la personne mise en cause devant le tribunal doit avoir été suffisamment complète.
Il devra être précisé que le tribunal correctionnel n’est pas compétent pour juger un mineur. Ainsi, la garde à vue d’un mineur ne saurait être suivie d’une procédure de comparution immédiate devant le tribunal correctionnel. Si tel devait tout de même être le cas, pour telle ou telle raison, le tribunal renverra le dossier au procureur (art. 397-2-1 CPP).
Les étapes avant l’audience de comparution immédiate
Dans la grande majorité des cas, la procédure de comparution immédiate intervient à l’issue d’une garde à vue (v. : Le déroulement de la garde à vue : les principales étapes). Entre la fin de la garde à vue et le passage du prévenu devant tribunal correctionnel, se succéderont plusieurs étapes.
La rétention pour présentation
Lorsque la garde à vue prend fin, deux alternatives sont possibles :
- Soit le prévenu comparait devant le procureur de la République, le jour même, si les délais et les circonstances le permettent (art. 803-2 CPP).
- Soit le prévenu pourra être retenu provisoirement si, au contraire, les circonstances ne permettent pas sa comparution devant le procureur le jour même. Cette rétention pourra alors durer 20 heures au maximum (art. 803-3 CPP).
Pendant cette période, le prévenu conserve le droit d’être assisté par un avocat et d’être informé des suites possibles.
La présentation du prévenu devant le procureur de la République
La présentation au procureur est une étape déterminante où les options suivantes sont envisagées :
- Comparution immédiate : Lorsque les faits sont simples et les charges suffisantes, le procureur confirmera l’orientation du dossier. Il saisira donc le tribunal en vue que la personne soit jugée.
- Comparution à délai différé : Si le procureur estime finalement qu’un complément d’enquête ou des expertises sont nécessaires, il demandera à ce que la personne ne soit pas immédiatement jugée devant le tribunal correctionnel. Dans ce cas se posera la question du sort du prévenu dans l’attente de la prochaine audience.
- Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) : Si le prévenu reconnaît les faits, le procureur pourra réorienter l’affaire vers la procédure de CRPC (v. : La Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité (CRPC) : définition, déroulement et enjeux)
- Convocation par procès-verbal (CPPV) : Le procureur pourra également estimer qu’il n’y a pas d’urgence à ce que le prévenu soit jugé immédiatement. Il pourra alors convoquer le prévenu à une audience ultérieure.
L’article 393 du CPP prévoit que le procureur choisira les suites du dossier parmi ces options après avoir recueilli les observations de la personne et celles de son avocat.
L’enquête de personnalité : objectifs et contenu
Dans l’attente de sa présentation au procureur, la personne mise en cause devra rencontrer un enquêteur de personnalité (art. 41 CPP). Cette enquête, menée par des services tels que l’APCARS (Agence de Politique Criminelle et d’Aide à la Réinsertion Sociale), vise en effet à recueillir des informations sur :
- Sa situation personnelle : Âge, état de santé, conditions de logement.
- Sa situation professionnelle : Emploi, formation, ressources financières.
- Ses antécédents judiciaires : Condamnations passées, récidive éventuelle.
- Le contexte familial : Soutien ou isolement social.
Ces éléments permettent au tribunal d’avoir une vision plus globale de la personnalité du prévenu. Conformément à l’article 132-1 du code pénal, toute peine doit être individualisée et donc être prononcée en fonction notamment de la personnalité de son auteur, de sa situation matérielle, familiale et sociale.
L’éventuel passage devant le Juge des libertés et de la détention
Si le procureur estime que la comparution à délai différé est nécessaire, la question qui se posera sera de savoir si le prévenu devra être incarcéré jusqu’à son jugement (placement en détention provisoire), ou si au contraire, il pourra être remis en liberté.
Dans ce cas, le prévenu est présenté au Juge des libertés et de la détention (JLD), qui peut décider :
- Le placement en détention provisoire, pour garantir la présence du prévenu lors du procès (v. : Détention provisoire : tout comprendre en 5 min.).
- L’assignation à résidence sous surveillance électronique, comme alternative à la détention.
- Le contrôle judiciaire, avec des obligations spécifiques adaptées au profil du prévenu.
Le JLD statue donc en prenant en considération les renseignements recueillis lors de l’enquête de personnalité et les éventuels éléments obtenus auprès des proches du prévenu.
Le déroulement de l’audience de comparution immédiate
L’audience suit un déroulement structuré :
- Présentation des faits : Le président expose les faits et les charges retenues.
- Examen de la personnalité : Le tribunal analyse les antécédents, le contexte social et les informations de l’enquête de personnalité.
- Réquisitions du procureur : Le ministère public demande une peine en fonction des faits.
- Plaidoirie de la partie civile : Si une victime est impliquée, elle peut demander réparation.
- Plaidoirie de la défense : L’avocat soulève des arguments pour contester les faits ou minimiser les peines.
- Délibéré : Le tribunal rend son jugement, souvent le jour même.
Le prévenu pourra être assisté d’un interprète s’il n’est pas francophone.
De même, lors de l’audience, conformément à l’article 406 du CPP, il pourra exercer son droit au silence ou s’exprimer sur les faits et sa situation personnelle (étapes 1 et 2). De même que le tribunal, le procureur ou la partie civile pourront l’interroger si besoin.
Les alternatives au jugement immédiat : renvoi de l’affaire à une audience ultérieure
Le renvoi de l’affaire pour préparer sa défense
La loi garantit au prévenu le droit de demander un renvoi pour organiser sa défense :
- Délai classique : Entre 2 semaines et 6 semaines (article 397-1 CPP).
- Cas complexes : Jusqu’à 2 ou 4 mois, notamment si la peine encourue dépasse 7 ans.
Ces délais permettent à l’avocat de demander des pièces supplémentaires nécessaires à la défense de son client ou d’approfondir certains éléments du dossier.
Si la personne décide de bénéficier d’un délai pour préparer sa défense, son avocat demandera alors que l’affaire soit renvoyée à une audience ultérieure.
Le tribunal n’aura pas le choix et devra alors accorder le renvoi de l’affaire.
Dans ce cas, l’affaire ne sera pas jugée immédiatement. Le tribunal devra ainsi statuer sur le sort du prévenu jusqu’à ce que l’audience prochaine se tienne.
Comme devant le JLD, le tribunal décidera donc du sort du prévenu :
- Soit il sera incarcéré pendant cette période : il sera placé en détention provisoire
- Soit il sera remis en liberté, avec au besoin un contrôle judiciaire.
Pour prendre sa décision, le tribunal se référera aux éléments de personnalité du prévenu (situation professionnelle, familiale, administrative) ainsi qu’à la gravité de l’infraction qui lui est reprochée.
Plus les garanties de représentation du prévenu seront solides, plus il aura de chances d’être remis en liberté.
Le renvoi de l’affaire devant le juge d’instruction
Si l’affaire est complexe ou nécessite des investigations complémentaires (témoignages, expertises techniques), le tribunal peut estimer que l’affaire n’est pas prête pour être jugée.
Le tribunal ne prononcera donc aucun jugement mais renverra l’affaire devant le ministère public pour ouverture d’une information judiciaire (article 397-1, al. 1er CPP). Le juge d’instruction devient alors chargé de poursuivre les investigations nécessaires.
À l’issue de l’audience : le renvoi de l’affaire sur les intérêts civils
Dans certains cas où il y a des victimes, il est possible que l’affaire présente suffisamment d’éléments concernant la culpabilité du prévenu mais qu’en revanche, il n’y en ait pas assez concernant l’évaluation du dommage de la victime.
Dans ce cas, le tribunal pourra « scinder son jugement en deux » en condamnant le prévenu à une peine pénale, mais ne statuera pas sur les demandes indemnitaires de la victime, estimant qu’il est nécessaire d’avoir plus de pièces concernant l’évaluation de son préjudice.
Le tribunal pourra alors pourra ordonner une expertise et renvoyer l’affaire à une audience ultérieure (audience sur intérêts civils) pour être mieux à même de juger. Ce sera notamment le cas, en présence d’une victime ayant subi des dommages graves ou non encore consolidés.
Si la juridiction ne prononce pas de décision définitive sur la demande de dommages-intérêts immédiatement, elle pourra néanmoins condamner le prévenu au paiement d’une somme à titre de provision.
Les peines encourues en comparution immédiate
Les sanctions varient selon la gravité des faits :
- Peines maximales : Jusqu’à 10 ans pour un délit correctionnel, porté à 20 ans en cas de récidive légale pour les infractions les plus graves.
- Autres peines : Les juges peuvent prononcer des amendes, interdictions professionnelles, ou sursis selon le dossier.
En cas de condamnation à une peine d’emprisonnement, le tribunal pourra décider que cette peine soit immédiatement mise à exécution.
Dans ce cas, le tribunal délivrera un mandat de dépôt, on parlera alors de « mandat de dépôt à la barre » (v. Le mandat de dépôt : l’essentiel en 3 minutes)
Concrètement la personne ira directement en maison d’arrêt à l’issue de l’audience pénale.
À l’inverse, le tribunal pourra décider que la personne condamnée puisse aménager sa peine d’emprisonnement. La personne repartira alors libre.
Elle sera en revanche convoquée ultérieurement devant le juge de l’application des peines (JAP) pour que sa peine d’emprisonnement soit aménagée.
Enfin, dans certaines situations et notamment pour les peines courtes, le tribunal pourra aménager la peine d’emprisonnement ferme « directement à la barre ». On parlera alors d’ « aménagement ab initio ».
Conclusion : pourquoi le rôle de l’avocat est-il si important en comparution immédiate ?
La comparution immédiate est une procédure accélérée qui ne doit jamais être prise à la légère. Les enjeux sont très sérieux dès lors que les peines encourues peuvent aller jusqu’à 20 années d’emprisonnement.
L’avocat a donc un rôle majeur à chaque étape de cette procédure. Il pourra :
- Influer sur le choix du procureur en proposant des alternatives à la procédure de comparution immédiate (CRPC, convocation par procès-verbal à une date ultérieure…).
- Vous préparer pour l’audience de comparution immédiate : choix de la stratégie de défense, choix de vos réponses, posture à adopter…
- Vous conseiller sur l’opportunité de demander un délai pour préparer sa défense.
- Détecter les éventuels vices de procédure affectant votre dossier pénal.
- Obtenir des pièces de personnalité auprès de vos proches pour présenter les meilleures garanties de représentation possible (en cas de comparution à délai différé ou de demande de délai pour préparer votre défense)
L’accompagnement d’un avocat spécialisé en droit pénal est votre meilleur atout pour maximiser vos chances de remise en liberté dès votre présentation devant le procureur ou à l’issue de l’audience de comparution immédiate.
Pour obtenir un avis personnalisé sur votre situation ou celle d’un proche n’hésitez pas à nous contacter. Nous vous répondrons sans délai.