Dans le cadre de la procédure pénale, l’information judiciaire constitue une étape cruciale pour garantir un traitement approfondi des affaires complexes. Placée sous la direction du juge d’instruction, cette procédure vise à établir la vérité tout en assurant les droits des parties. Cet article explore les spécificités de l’information judiciaire.

Sommaire

  1. Qu’est-ce que l’information judiciaire ? Définition et cadre légal
  2. Enquête préliminaire, enquête de flagrance ou information judiciaire : quelles différences ?
  3. Dans quels cas une information judiciaire est-elle ouverte ?
  4. Quels sont les statuts d’une personne mise en cause ?
  5. Comment se déroule une information judiciaire ? Les grandes étapes
  6. Quels sont les droits des personnes mises en examen ?
  7. Les nullités de procédure : un levier de défense essentiel
  8. Combien de temps dure une information judiciaire ?
  9. Conclusion : pourquoi faire appel à un avocat en cas d’information judiciaire ?

Qu’est-ce que l’information judiciaire ? Définition et cadre légal

L’information judiciaire (encore appelée « instruction préparatoire ») est une procédure d’enquête approfondie dirigée par un juge d’instruction. Elle est régie par les articles 79 à 84-1 du code de procédure pénale. Elle vise à rassembler les preuves nécessaires à la manifestation de la vérité. Cette procédure se distingue par son caractère contradictoire et garantit un cadre structuré pour les investigations.

Enquête préliminaire, enquête de flagrance ou information judiciaire : quelles différences ?

L’information judiciaire se distingue des enquêtes préliminaires ou de flagrance sur plusieurs points :

  • Direction de l’enquête : Alors que les enquêtes préliminaires ou de flagrance sont conduites par le procureur, l’information judiciaire est placée sous l’autorité d’un juge d’instruction.
  • Pouvoirs du juge d’instruction : Le juge d’instruction dispose de pouvoirs beaucoup plus intrusifs que le parquet, tels que les écoutes téléphoniques, les sonorisations ou la géolocalisation en temps réel. Ces actes, souvent attentatoires aux libertés fondamentales, ne peuvent donc être exécutés par le parquet sans l’autorisation préalable d’un autre magistrat, le Juge des libertés et de la détention (JLD).
  • Accès au dossier pénal : Dans le cadre d’une information judiciaire, la personne mise en examen a accès au dossier pénal (art. 114 du code de procédure pénale). A contrario, une personne mise en cause dans le cadre d’une enquête pénale conduite par le procureur n’aura aucune possibilité de connaitre les actes d’enquête réalisés avant la fin de la procédure. Finalement, la personne mise en cause découvrira les éléments du dossier pénal uniquement lors de son renvoi devant le tribunal correctionnel.
  • Participation active à l’enquête : Le mis en examen pourra demander la réalisation d’actes d’investigation spécifiques, contribuant ainsi directement à la recherche de la vérité (art. 81, al. 9, 82-1, 156 et 167 du code de procédure pénale).

Dans quels cas une information judiciaire est-elle ouverte ?

Conformément à l’article 79 du code de procédure pénale, l’information judiciaire peut être ouverte dans plusieurs cas :

  • En cas de crime, l’instruction est obligatoire.
  • Pour les délits nécessitant des investigations complexes, elle est en revanche facultative.
  • Enfin, pour certaines contraventions, une information peut être ouverte. Cette décision ne peut alors qu’émaner du parquet dans des cas très exceptionnels seulement (art. 44 du code de procédure pénale).

De manière pratique, l’ouverture d’une information judiciaire est initiée :

  • Soit par un réquisitoire introductif du parquet
  • Soit par une plainte avec constitution de partie civile

Quels sont les statuts d’une personne mise en cause ?

Le juge d’instruction pourra décider soit de placer la personne sous le statut de témoin assisté soit sous le statut de mis en examen.

  • Mis en examen : Ce statut est attribué lorsque des indices graves ou concordants impliquent une personne dans les faits poursuivis. Tout au long de l’information judiciaire, la personne mise en examen pourra être libre, placée sous contrôle judiciaire (et soumis à certaines obligations), assignée à résidence sous surveillance électronique ou placée en détention provisoire.
  • Témoin assisté : Il s’agit d’un statut intermédiaire. Une personne pourra être placée sous témoin assisté lorsqu’il existe des indices sérieux mais insuffisants pour une mise en examen. Ce statut offre des droits limités mais une meilleure protection que celui de simple témoin.

Comment se déroule une information judiciaire ? Les grandes étapes

La saisine du juge d’instruction

Un juge d’instruction sera désigné via un réquisitoire du parquet ou par une plainte avec constitution de partie civile.

Dans le cadre d’une information judiciaire, le juge d’instruction a pour mission d’établir les faits (art. 81, al. 1er du code de procédure pénale) et la personnalité de leur auteur (art. 81, al. 6 à 8 du code de procédure pénale).

La mise en examen ou témoin assisté.

Selon les indices à charge, le juge décide du statut de la personne à l’issue d’un premier interrogatoire appelé « interrogatoire de première comparution » (Mis en examen / Témoin assisté).

Le déroulement de l’information judiciaire : les principaux actes d’instruction

Pour accomplir sa mission, le juge d’instruction pourra procéder à une multitude d’actes d’investigation. À titre d’exemple, l’on pourra notamment citer :

  • procéder à une reconstitution ;
  • verser à la procédure, à titre de renseignements, des copies de pièces figurant dans un autre dossier (Crim., 17 juill. 1990, Bull. crim. n° 286) ;
  • procéder à une vidéosurveillance sur la voie publique (Crim., 18 juin 2019, n° 18-86.421).
  • placer une personne sur écoute téléphonique (art. 100 et suivants du code de procédure pénale).
  • ordonner des expertises médicales, scientifiques, techniques… (art. 156 et suivants du code de procédure pénale)
  • autoriser la géolocalisation d’une personne ou d’un objet (art. 230-32 et suivants du code de procédure pénale).
  • faire procéder à l’audition d’un suspect sous régime d’audition libre ou de garde à vue (art. 154 du code de procédure pénale)

La clôture de l’instruction

À l’issue de ses investigations, le juge d’instruction doit aviser les parties de ce que l’instruction lui paraît terminée. À cette occasion le juge adressera un « l’avis de fin d’information ».

Après avoir recueilli les réquisitions du parquet, les observations du mis en examen, du témoin assisté et de la partie civile, le juge d’instruction pourra éventuellement faire droit à une demande de complément d’information (art. 175 du code de procédure pénale).

C’est alors que le magistrat instructeur pourra rendre sa décision finale, que l’on appelle « ordonnance ».

Il s’agira :

  • Soit d’une ordonnance de renvoi devant une juridiction de jugement :
    • devant le tribunal de police si les faits constituent une contravention (art. 178, 1er du code de procédure pénale) ;
    • devant le tribunal correctionnel si les faits poursuivis constituent un délit (art. 179, al. 1er du code de procédure pénale) ;
    • devant la cour d’assises ou la cour criminelle départementale si les faits retenus à la charge des personnes mises en examen constituent une infraction qualifiée crime par la loi (art. 181, al. 1er et 181-1 du code de procédure pénale).
  • Soit d’une ordonnance de non-lieu : Si les charges sont insuffisantes (art. 177 al. 1er  du code de procédure pénale).

Quels sont les droits des personnes mises en examen ?

Tout au long de l’information judiciaire, la personne mise en examen disposera de plusieurs droits et notamment :

  • Accès au dossier d’instruction. La personne mise en examen peut en effet consulter et obtenir copie des pièces du dossier.
  • Droit à un avocat. L’assistance d’un avocat est également garantie dès la première comparution devant le juge d’instruction (audition de première comparution).
  • Demande d’actes. La personne mise en examen a par ailleurs la possibilité de demander au juge d’instruction que soient réalisés des actes d’enquête (expertises, confrontations, auditions) ou de contester ceux déjà réalisés.
  • Recours et contestations. Les décisions du juge d’instruction pourront enfin être contestées devant la chambre de l’instruction de la Cour d’appel.

Les nullités de procédure : un levier de défense essentiel

Afin que les droits des personnes mises en examen soient respectés, les actes d’investigations réalisés doivent répondre à une multitude d’exigences formelles (autorisations, délais, mentions expresses…).

En cas de violations de ces exigences, ces actes seront irréguliers et donc nuls. On parle de « nullités de procédure ».

Ainsi, les nullités de procédure peuvent être soulevées en cas de :

  • Violation des droits de la défense.
  • Défaut de notification de certains droits.
  • Actes réalisés en dehors des prérogatives du juge d’instruction ou des délais impartis.

Ces nullités peuvent conduire à l’annulation de certains actes ou de toute la procédure.

Combien de temps dure une information judiciaire ?

La durée d’une information judiciaire varie en fonction d’une multitude d’éléments (gravité de l’infraction, nature de l’infraction, nombre de personnes mises en cause, complexité de l’affaire…).

Finalement, à l’ouverture de l’information judiciaire, à défaut de pouvoir connaitre sa durée exacte, le juge d’instruction se contentera d’estimer le délai prévisible d’achèvement de l’information judiciaire.

  • Délais moyens : Une instruction dure en moyenne un an pour les affaires correctionnelles et dix-huit mois pour les crimes.
  • Prolongations : Les délais peuvent être prolongés pour des raisons justifiées, notamment en cas d’affaires complexes.

Il convient de préciser que les parties peuvent contester les délais excessifs devant la chambre de l’instruction.

Conclusion : pourquoi faire appel à un avocat en cas d’information judiciaire ?

En conclusion, l’information judiciaire constitue une étape incontournable pour instruire les affaires pénales graves et/ou complexes.

Il s’agit d’une procédure, lourde, complexe et longue dont les enjeux importants (détention provisoire éventuelle, renvoi devant le tribunal correctionnel ou une cours d’assises…). Aussi, il est crucial qu’une personne inquiétée par ce type de procédure soit accompagnée par un avocat spécialisé en droit pénal.

Un avocat spécialisé sera en effet indispensable pour :

  • Garantir le respect des droits du mis en examen ou du témoin assisté.
  • Étudier le dossier pénal
  • Préparer les auditions et confrontations
  • Identifier et soulever des nullités éventuelles.
  • Formuler des demandes d’actes et bâtir une défense solide.

Si vous ou un proche êtes concerné par une telle procédure, contactez notre cabinet pour un accompagnement personnalisé et rigoureux.