L’audition pénale libre dite « audition libre », permet aux autorités d’entendre une personne suspectée d’avoir commis une infraction sans la placer en garde à vue. Cette mesure est donc moins contraignante que la mesure de garde à vue. Pour autant, l’audition libre constitue une étape délicate pour la personne concernée.

Cet article vise donc à aborder les aspects pratiques de l’audition libre.

Sommaire

  1. Qu’est-ce que l’audition libre ?
  2. Les droits du suspect lors de l’audition libre
  3. La convocation, le déroulement de l’audition libre
  4. Les suites possibles à l’issue de l’audition libre
  5. Conclusion : le rôle primordial de l’avocat lors de l’audition libre

Qu’est-ce que l’audition libre ?

L’audition libre est une procédure par laquelle une personne est entendue par les autorités judiciaires sans être placée en garde à vue. Elle concerne les individus pour lesquels il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’ils ont commis ou tenté de commettre une infraction, mais sans nécessiter de mesures coercitives. Cette procédure est encadrée par l’article 61-1 du code de procédure pénale (CPP).

Créée par la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, l’audition libre garantit des droits au suspect dès son audition, en conformité avec les exigences de la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH, art. 6). Ce cadre procédural vise en effet à prévenir les abus et à respecter la présomption d’innocence.

Enfin, il est à préciser que l’audition pénale libre peut intervenir tant dans le cadre d’une enquête pénale que d’une information judiciaire ouverte auprès d’un juge d’instruction.

Les droits du suspect lors de l’audition libre

Lors d’une audition libre, le suspect bénéficie de plusieurs droits fondamentaux, rappelés par l’article 61-1 du CPP :

  • Droit de quitter les lieux à tout moment : la personne entendue peut mettre fin à l’audition et partir librement.
  • Droit d’être informé des faits reprochés : le suspect doit connaitre la nature, la date et le lieu présumés de l’infraction.
  • Droit de se taire : il peut choisir de ne pas répondre aux questions ou de faire des déclarations spontanées (art. préliminaire du CPP).
  • Assistance d’un avocat : si l’infraction est punie d’une peine d’emprisonnement, le suspect a le droit d’être assisté par un avocat dès le début de l’audition (art. 63-3-1 CPP).
  • Droit à un interprète : si le suspect ne comprend pas la langue française, il a droit à l’assistance d’un interprète.

Ces droits doivent être notifiés au suspect avant le début de l’audition libre, conformément à l’article 61-1 du CPP.

La convocation, le déroulement de l’audition libre

Selon l’article 61 du CPP, les personnes convoquées sont tenues de comparaître. En pratique, la convocation se fera par téléphone. L’enquêteur pourra néanmoins adresser une convocation par écrit en plus, souvent par mail.

Si la personne qui ne répond pas à la convocation, l’officier de police judiciaire peut la contraindre à se présenter.

Généralement, le suspect est convoqué au commissariat de police ou à la gendarmerie pour y être entendu.

Cependant, dans certains cas, l’audition pourra se dérouler sur le lieu de travail du suspect. À titre d’exemple, lorsque le suspect est entendu en sa qualité de professionnel (dirigeant de société, expert-comptable, commissaire aux comptes…), les services d’enquête pourront choisir d’auditionner la personne directement sur son lieu de travail en vue d’obtenir la transmission de certains documents susceptibles d’y être stockés.

Selon le l’infraction suspectée, la durée de l’audition libre variera. L’audition libre pourra en effet durer plusieurs heures, voire la journée entière, si les faits sont particulièrement complexes et/ou graves. Il s’agira notamment d’infractions financières ou commises en bande organisée (trafic de stupéfiant).

En outre, au cours de l’audition libre, l’enquêteur pourra demander la transmission de documents ou de pièces nécessaires à l’enquête. Il pourra en plus être procédé à la prise des empreintes digitales de la personne suspectée (art. 55-1 du CPP).

Au terme de l’audition pénale libre, l’officier de police judiciaire dresse un procès-verbal des déclarations de la personne entendue. La personne suspecte procédera à sa lecture et pourra formuler des observations.

Les suites possibles à l’issue de l’audition libre

À l’issue d’une audition libre, plusieurs alternatives sont possibles :

  • Classement sans suite : si les éléments recueillis ne justifient pas de poursuites, le procureur de la République peut décider de classer l’affaire (art. 40-1 CPP).
  • Poursuites judiciaires : si des éléments suffisants sont réunis, des poursuites peuvent être engagées, pouvant conduire à une convocation devant le tribunal correctionnel. La convocation se fera généralement par « convocation par officier de police judiciaire » (COPJ). De manière plus rare, si les circonstances l’exigent, le suspect pourra être renvoyé devant le tribunal correctionnel selon la procédure de comparution immédiate.
  • Placement en garde à vue : si, au cours de l’audition, des éléments nouveaux apparaissent justifiant une mesure coercitive, le suspect peut être placé en garde à vue (pour en savoir plus v. : Le déroulement de la garde à vue : les principales étapes) .
  • Convocation pour un interrogatoire de première comparution : le suspect pourra être convoqué ultérieurement par un juge d’instruction en vue d’être mis en examen, si les déclarations du suspect n’ont pas été suffisamment convaincante et qu’il ressort de l’instruction des éléments à la charge du suspect.

Il est important de noter que les déclarations faites lors de l’audition libre sont consignées sur procès-verbal. Ces déclarations pourront ainsi être utilisées ultérieurement en cas de poursuite (dans le cadre d’une garde à vue, devant le tribunal correctionnel ou le juge d’instruction).

Conclusion : le rôle primordial de l’avocat

Si l’audition libre est une procédure moins contraignante que la garde à vue, elle n’en demeure pas moins sérieuse. En effet, selon les déclarations que vous aurez faites, l’audition libre pourra donner lieu à des poursuites judiciaires graves.

Ainsi, l’assistance d’un avocat dans le cadre de cette procédure est primordiale. L’intervention de l’avocat vous sera en effet nécessaire pour :

  • Préparer l’audition libre avec vous : opportunité de garder le silence ou non, aide dans la formulation de réponses appropriées, choix de documents/pièces à transmettre aux services d’enquête… ;
  • Organiser l’audition libre et si nécessaire décaler l’audition pénale ;
  • Veiller au respect de vos droits lors de votre audition pénale ;
  • S’assurer que vos déclarations ne seront pas utilisées contre vous de manière préjudiciable ;
  • Formuler toutes observations utiles à l’issue de l’audition (sur le déroulé de l’audition ou sur le fond de l’affaire)
  • Poser des questions sur des points du dossier qui n’ont pas été abordés par l’enquêteur.

Dès convocation par tel service de police ou de gendarmerie, nous vous conseillons donc de prendre immédiatement contact avec un avocat pénaliste. Plus vous le contacterez tôt, plus vous disposerez de temps pour préparer votre défense.

Enfin, nous attirons votre attention sur le fait que même en cas de classement sans suite à l’issue de l’audition libre, vous serez fiché au fichier TAJ (pour en savoir plus v. : L’effacement du fichier TAJ : Tout ce que vous devez savoir).

Pour toute question ou assistance juridique concernant l’audition pénale libre, n’hésitez pas à consulter notre cabinet spécialisé en droit pénal.